Et les yeux métalliques
Les échéances se dressent sur le bitume des trottoirs lourds de chaleur, font gondoler l'asphalte et s'immiscent dans mon ventre qui se creuse. Comme s'il n'y avait eu aucune pause, supposant l'inanité de ces derniers jours vides. Mes cahiers sont empilés, rangés. Oubliés. Certaines vérités m'éclatent au visage et je me sens démunie face au gâchis que je tiens entre mes doigts. C'est liquide le gâchis, ça n'a aucune substance, ça coule, ça file comme de l'eau claire autour des phalanges, ça a le goût édulcoré des regrets. Les choix pris pour de mauvaises raisons hier sont forcément à payer aujourd'hui. Lorsque les paupières se font un peu moins aveugles, lorsqu'on accepte d'entrouvrir un oeil, de digérer certaines choses jusque là coincées dans la gorge. M'engager dans une voie qui ne sert pas mes aptitudes, pour me malmener, encore un peu, toujours cette logique d'expiation permanente, pour m'obliger à me forcer, surtout que ce ne soit pas facile. Au contraire, que ce soit rude, pénible, douloureux. Opter une orientation dans laquelle je ne m'épanouirais pas. Au fil des mois, les pièces du puzzle trouvent leur place, le regard change et je me retrouve avec des cours entre les mains, des cours qui me donnent envie de disparaitre tant ils ne m'intéressent pas, tant je n'y arrive pas. Avoir voulu s'en faire baver et le payer aujourd'hui, s'être contrainte à l'austérité et à la rigueur, s'être emballée dans un corset comme un otage, de soi. Songer aux sentiers que j'aurais choisis si d'autres raisons, plus saines, m'avaient animée. Je finis ma tasse de café et les livres s'entassent en piles incertaines sur les étagères. La réponse n'est pas très compliquée, elle a toujours été sous mon nez et, toujours, je détournais les yeux. Pas assez glorieux comme projet. L'idéal c'est de se hisser en haut par l'effort, les bras distordus ; tendus à s'en rompre les veines. Ca, c'est noble. Ca, c'est un comportement méritant. Ca, c'est une attitude qui t'apportera l'absolution. Après une année dans ce carcan, je peux dire que non, ça ne l'est pas. Il reste juste de l'amertume et de la frustration, un parfum de regrets légèrement acerbes qui pourrit dans la bouche.