Two Shots To The Head*
Je ne sais plus trop quelle musique passe, ça tourne en permanence, je lance des radios à thème et je laisse les notes les voix les accords couler. Il me dit qu'il faudrait commencer à faire les cartons et la perspective du déménagement se teinte de réel. Je ne prends toujours conscience des choses que lorsque ça devient concret. Avant, impossible, il y a une vitre. Je ferme les yeux, je refuse de voir quoique ce soit tant que ce n'est pas sûr. A quoi bon penser et s'angoisser (les deux allant souvent de pair) pour rien ? Mais quand ça se confirme, quand on me dit on déménage à la fin du mois, le sol s'effrite sous mes pieds et une boule monte jusque dans ma gorge. Et je me retrouve bête et démunie, car nous en parlons depuis des mois, car je le savais, car j'ai dit oui. Mais c'est comme dire oui au vent. On imagine quelque chose et on articule son accord du bout des lèvres. Ma tête s'emmêle sacrement plus lorsque la réalité s'immisce. Lorsque je me vois ôter mes affaires des étagères et les empiler -à nouveau- dans des cartons. Tout débarrasser, vider, balayer ma vie une nouvelle fois pour la déballer autre part. Me dire que je ne vivrais plus seule, louper une marche. Essayer de ne pas trop y penser tout de même, comme toujours, renflouer. Eclater plus tard, pas maintenant, non, pas là. Là, il y a la fatigue et l'appréhension douceâtre déjà présente des prochains jours. Ce matin, ils ont dit deuxième année, difficulté, beaucoup de travail. Les mails avec les plannings de khôlles sont arrivés dans l'après-midi, je remplis mon agenda et je ressors des cahiers que deux mois de vacances ont rendu tristes et austères. Je relis des pages oubliées et je me dis que c'est la dernière année. Même quand ils parlent d'un concours blanc dans quelques semaines, je ne me casse pas. Je réfléchis simplement à la façon dont organiser mes révisions. Je remets la carte de bibliothèque dans le porte-feuille, je reste immobile ensuite. C'est la dernière année, ce n'est pas la mort, ça va passer, comme la première, comme le reste, les jours vont se défiler sous mes yeux et un matin, ce sera fini.
* Une chanson d'Emily Jane White