Je me suis achetée le cd de Munshy, je ne sais
Je me suis achetée le cd de Munshy, je ne sais pas combien de fois je l'écoute par jour, combien de fois il tourne et retourne dans ma chaine, combien de fois je rappuie sur play. Mes cheveux ont (re)poussé, un peu. J'ai de jolies boucles d'oreilles, glissées dans ma poche et un foulard à nouer dans mes cheveux parce que le coiffeur m'avait prévenu que ça ferait "bizarre" quand ça allait repousser. Moi je me regarde dans le miroir et je ne trouve pas ça bizarre. Pour être plus précise, je ne trouve rien. Je m'enveloppe dans des pulls informes noirs et reprends du poil de la bête. Je suis partie quelques jours, ailleurs et j'ai réalisé. A quel point mon quotidien était pourri. Mais dans le sens, empoisonné. Gangrené. J'ai acheté le journal et le livre de ce journaliste qu'il m'a conseillé. Je mets la lecture de mes romans entre parenthèses. Entre de toutes petites parenthèses quand même. Une ancienne prof est passée où je travaille. Elle a parlé avec mon responsable qui est aussi son meilleur ami. Elle a dit que j'étais une élève brillante et douée. Tout ceci semble tellement loin que ça me glisse dessus. Elle ne parle pas de moi. J'envoie mes dossiers la semaine prochaine. Je rencontre un garçon lundi et, ça faisait longtemps, je suis entrée dans un magasin avec l'idée de trouver un joli vêtement pour l'occasion. Je suis repartie avec une robe, une sorte de long gilet avec de gros boutons lisses noirs et deux immenses poches. Je l'ai trouvée décalée. Quand je l'ai montrée à M. elle m'a dit que c'était tout à fait. Mon style. J'ai souri. Il faut que je rachète des cigarettes. Et que je me rachète une vie et un sourire aussi. Il y a cet homme aussi. Qui a un cheveu sur la langue, un tout petit chuintement qui lui glisse sur les lèvres. Il a de beaux yeux bleus délavés. Je n'ose pas lui dire que j'ai simplement envie de faire l'amour avec lui. Ma plaie cicatrise doucement. Il l'a vu, il n'a pas écarquillé ses yeux. Il a eu l'air de comprendre ou du moins, de connaître. Je me rends compte à quel point je suis dispersée. Tout le temps. Je n'ai pas défait ma valise. J'ai le casque sur les oreilles. Je dépense peut-être un peu trop. Mais je vous assure que la robe est vraiment jolie et que l'affiche du "Baiser de l'hôtel de ville" pris par R.D. est bien mieux accrochée à mon mur. J'ai rafistolé mon sac à main avec un bout de laine violet. J'ai une toile à peindre et l'ancre qui pendait à mon cou est cassée. Je me fais (re)tatouer dans deux semaines et j'ai mes ongles à peindre en transparent. Aussi, je commence à connaitre les codes des produits du magasin, pour les pommes et les primevères. D'autres choses aussi. Je m'efforce de m'accrocher fermement mais j'ai peur de glisser. Et je me suis achetée des petites baskets en toile avec des rayures. Comme ça je souris quand je regarde mes pieds.
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