Sans bruit
Bien sûr que j'y ai songé. Ce matin, il y avait un tel brouillard. J'aurais aimé disparaître avec cette image. Depuis que l'idée m'est revenue en tête vendredi soir. Mais on se résigne, on se musèle, on fait semblant de ne pas s'entendre pleurer et implorer. Depuis deux jours, je vis comme en suspension. Je flotte. Je parcours des rues, des trottoirs, je mange, vomis, écoute de la musique, lis, souris, parle, apprend, récite. Je vis mais c'est comme une supercherie. Comme si mes pensées me faisaient tellement mal que je les remisais loin à l'intérieur là où ça ne touche plus. Ou plutôt, comme si je m'étais renfoncée loin à l'intérieur de moi là où les remous ne bousculent plus. C'est comme un soleil sans la chaleur. Je me suis recroquevillée entre les parois de mon corps, de mon crâne, loin derrière les remparts. En pilotage automatique. C'est tellement pratique. Tellement plus viable et reposant. Je ne veux plus m'écrouler comme les derniers jours. Je suis fatiguée, je ne veux plus. Fatiguée jusqu'aux os. C'est comme une prière formulée du bout des lèvres. Une trêve murmurée du bout des cils humides.