J'ai la tête qui délire, des mots plein la gorge.
J'ai la tête qui délire, des mots plein la gorge. je m'écroule de fatigue, j'aligne des milliards de phrases que j'envoie. je disperse mes mots, je reçois les siens et dans mes pensées, je m'abandonne dans ses bras. Il m'a dit je vais vous prescrire un anxiolytique et ça ne va pas je vous donnerai un anti-deprésseur. J'ai serré les dents, fort ; à m'en exploser la machoire. Parce tu vois ça, ce qui nous colle à la peau, ce qui s'accroche à nos talons, ce sont nos vies. Et regarde comme elles ne valent rien, c'est du vent, c'est de la merde, ça s'arrache à pleines mains. C'est ça que tu voulais ? C'est à ça que tu croyais ? Vas-y pleure la gamine. Je te déteste parce qu'avec tes espérances, tu m'as démoli. Tu m'as promis, tu m'as dit tiens le coup, tu verras mais je ne vois rien. Rien que le vide éreintant. Moi j'ai juste envie d'abandonner, de déposer les armes. J'enlève le fusil de mon épaule, je le pose à mes pieds, ou sur ma tempe, peu importe. Vous pourrez dire que je suis faible, qu'il faut continuer d'y croire, qu'il faut qu'il faut mais. Mais non. Moi je sens bien que je suis à bout de forces, et je me vide de larmes. J'en fais des cauchemars dont la sueur âcre glisse le long de mon dos. Je me réveille en sursaut et alors le noir m'étrangle, et je hurle en silence et mes yeux se creusent et dans ma poitrine les griffes de la détresse font des ravages. Vous pourrez dire que je ne me bats pas assez, vous pourrez dire que je suis pitoyable. Je le sais bien tout ça. Je le sais bien. Mais tu vois, il y a ceux qui disent aussi que je n'aurais pas dû vivre tout ce que j'ai vécu jusqu'ici. Que les coups, j'étais trop jeune pour cela. Que la haine, la force de la colère, les côtes cassées, l'intégrité bafouée, la dignité et le respect occulté, tout ça, l'enfer, ils disent que j'étais bien trop jeune. Mais je n'ai pas choisi. Si je savais qu'il s'amuserait à m'arracher les ailes comme aux papillons, je serais partie, j'aurais fui. Mais je me suis crue plus forte, je me suis dit que ça irait, que ça passerait. Je l'aimais. Je l'aimais, tu comprends. Ca pardonne tout. Parce que non, même aujourd'hui, je ne lui en veux pas. Tu sais, je me dis qu'on n'est pas méchant sans raisons. Alors au fond c'est que j'avais dû le mériter. Au fond, je suis une pute qui ne vaut rien. J'aurais voulu mourir sous ses coups, ça aurait été tellement plus simple. De ne pas avoir à vivre avec. Ces gens là ils disent aussi que j'ai un grand manque affectif parce que mes parents n'ont jamais été présents. Parce que ma mère ne m'a jamais soutenu, jamais encouragé. Parce qu'elle m'envie et qu'elle ne croit pas en moi alors comment veux-tu que moi j'y arrive ? Si une mère ne croit pas en sa propre fille, comment veux-tu qu'elle, y parvienne ? Ce n'est pas grave. Tout ceci n'a plus d'importance. Ou justement si, ça en a trop pour que je puisse le regarder en face. Alors oui je vous le dis, je reconnais, j'abandonne. Voici mes étoiles, mes paillettes, mes espoirs. Je vous les donne, je n'en ai plus besoin. Parce que je sais que bientôt, même pour ce dont je suis le plus douée, je n'aurais plus la force.
Non, bientôt, je n'aurais même plus la force de sauver les apparences.