C'est une journée sans saveur. La pluie s'ébruite
C'est une journée sans saveur. La pluie s'ébruite sur les vitres, il fait gris. Il fait gris et je ne me souviens plus des journées précédentes. Quand tout te traverse mais que tu ne retiens rien, un moment, tu te lèves et tu es vide, tu sais. Ma sœur est prise. Ma pile de livres à lire ne cesse de s'allonger. Hier j'ai fini Les particules élémentaires et j'ai entamé F. Zeller. Je crois que j'approche de la pente glissante. Le point de rupture, de non-retour. Il faut que je m'effrite en mille morceaux pour pouvoir ensuite être autre. Immanquablement, je vais basculer dans un autre univers quand je vais me décider à récupérer le niveau. Nouveau rythme, nouveau programme, nouveaux objectifs. Je crois que ça me fait peur alors je laisse tout en chantier. Ma chambre est dans un tel état, j'ai commencé à la ranger hier et, je n'ai même pas pu dormir dedans. J'ai installé un matelas au pied du lit de ma soeur. J'écris et Radiohead hurle dans mes écouteurs. Pourtant j'en ai des choses à faire putain. Mais je n'arrive pas à faire le premier pas, je suis paralysée. Mardi soir, je suis allée chez M. et je suis repartie avec un sachet. C'est pour mieux apprendre à fuir. Mais ce n'est pas la solution, ce n'est pas ce qu'il faut faire. La raison babille dans ma tête et mes gestes restent raides. Hier, nous sommes allées au restaurant. Je me suis levée ce matin et j'étais vide. D'ailleurs, je n'ai rien à dire, en vrai. La semaine prochaine sera remplie. La semaine prochaine, il faudra réapprendre à marcher. Il me semble que je n'ai pas envie d'achever mon rangement parce qu'une fois que mon bureau sera dégagé, je n'aurais pas d'excuses pour ne pas y déposer mes cours précédents et. J'ai peur de ne rien y comprendre, peur d'avoir les yeux et l'esprit qui trébuchent, peur de voir que ça ne marchera jamais. D'en avoir la preuve, d'être au pied du mur. Alors je monte le son, ferme les yeux et m'embrume la tête. C'est beaucoup plus courageux. Je n'ai jamais dit que j'étais courageuse. Mon été sera ou ne sera pas et. En posant les yeux sur mon avant-bras, je me suis dit quand même. Quand même ma pauvre fille, ce que tu peux être abimée. Je crois que je perds un peu les pédales mais c'est normal. Je vais me casser la gueule pour pouvoir me relever. Me relever et entamer de nouveaux pas. Il va bien falloir, de toute façon. C'est ce que je me dis. C'est ridicule de repousser les échéances ainsi. Parce qu'à un moment, tu les auras sous le nez, sous la gorge et tu ne pourras plus fuir. Je voudrais être assez forte pour le comprendre vraiment et effectuer mon changement de trajectoire ; avant. Non, vraiment, je n'ai jamais dit que j'étais courageuse.